vendredi 13 septembre 2013

Les meilleurs album Rap US des années 2000 [2001]

Nous nous sommes quittés sur une année 2000 pleine d'espoir et de renouveau. En effet, en ce début de siècle le Rap a déjà plus de vingt ans d'existence et a naturellement connu plusieurs étapes. Des premiers artistes spoken words, aux block party tout en évoluant vers le rap afro-centré puis le gangsta Rap sur la fin des années 80 jusqu'au milieu des années 90. Fin 90, le Hip-Hop US est en pleine effervescence tandis que la Eastcoast ne se résume plus à New York où les scènes de Detroit ou Chicago se font une place au soleil et que plus au Sud une nouvelle tendance prend forme.
Sur le plan idéologique, l'an 2000 semble comme nous l'avons vu précédemment, revenir vers un Hip-Hop contestataire, revendicatif et sous certains angles : pro black. Pourtant, 2001 va être un tournant pour le Hip-Hop et un événement particulier va tuer dans l’œuf cet effort de renouveau. Le début de la fin pour les uns le début d'une nouvelle ère pour d'autre. La raison se trouve sous ce paragraphe, et je m'en expliquerai tout au long de l'article.

Plus rien ne sera comme avant


2001


10
Foxy Brown - Broken Silence


Pas une femme dans le top depuis Lil Kim. Néanmoins, la gente féminine fait un retour triomphant avec le désormais classique Broken Silence de Foxy Brown. Récits street et urbains le tout associé à des sonorités underground de grandes qualités. Une curiosité à écouter sans bouder son plaisir. (écouter un extrait)


9
NERD - In Search Off


Je vous vois venir. Est ce que Pharell Williams et ses NERD font du Rap ? La question bien que farfelue est totalement légitime tant Pharell et Chad Hugo ont contribué à révolutionné les sonorités Hip-Hop avant l'heure pour brouiller les pistes et ravir nos oreilles. Influence electro, pop et rock. Ce concentré alternatif s'accompagne d'odes aux femmes faciles et à l'hédonisme triomphant. Tout simplement en avance sur son temps. (écouter un extrait)


8
Jadakiss - Kiss the Game Goodbye


L'ancien protégé de Notorious BIG et membre de The LOX propose un solide premier album solo faisant école en matière de punchline. A écouter principalement en voiture. (écouter un extrait)


7
Aesop Rock - Labor Day


Un des derniers albums conscient avant une longue période. Un des derniers albums underground de qualité avant une très longue durée. Labor Day d'Aesop Rock n'est pas l'album d'un "blanc" se limitant à faire partager ses névroses en musique. Bien au contraire Labor Day donne corps à une oeuvre dépeignant une Amérique prolétaire et montrant l'illusion du rêve américain. (écouter un extrait)


6
Cormega - The Realness


Cormega est aussi talentueux que poisseux. Comment un mec aussi fort au micro peut il avoir une carrière aussi minable ? En dépit du charisme inexistant de son auteur, The Realness est pourtant une tuerie et sûrement LA surprise de 2001. Flow rageur et punchlines assassines au rendez vous. (écouter un extrait)



5
Missy Elliott - Miss E... So Addictive


Mère spirituelle d'une Nicki Minaj sur le terrain de l'excentricité. Le second album de Misdemeanor Elliott est le concentré de banger qui a fait sensation en 2001. L'album une nouvelle fois en avance sur son temps en terme de sonorité (electro et soul) donnera le tempo au rap féminin du XXIe siècle. Rien que ça. (écouter un extrait)


4
Cannibal Ox - Cold Vein


Comment aborder 2001 sans parler du duo Cannibal Ox ?  Pour beaucoup Cold Vein est le point culminant du rap underground. Cela s'explique par le choix intelligent des samples et surtout par la qualité incontestable des textes d'une poésie et d'une richesse rarement atteinte dans le Hip-Hop. Je ne peux qu'insister en vous recommandant chaudement de vous procurez d'urgence Cold Vein, le duo s'étant séparé en 2005 on ne risque pas de les revoir malheureusement. (écouter un extrait)



3
Jay-Z - The Blueprint


"BLASPHÈME !"

Oui, The Blueprint n'est que troisième. Si la masse fait du sixième album de Jay-Z l'album numéro un de 2001 je me permet d'aller à contre courant en ne lui attribuant qu'une troisième place amplement mérité. Le problème de Blueprint à mon sens, c'est qu'il ne représente finalement qu'une révolution sonore avant d’être une caution en terme de lyrics ce qui l’empêche d’être un tout. Concrètement, ce sont Kanye West et Just Blaze qui donnent du corps à l'album; tandis que Jay-Z n'est au final, pas plus inspiré que sur ses précédents albums. Lisez n'importe qu'elle chronique et vous vous rendrez compte que les éloges/critiques se focalisent d'avantage sur la présence du diss envers Nas: "The Takeover" et que globalement on applaudit le virage soulful de Jigga amené par ses producteurs. Oui la forme est privilégié par rapport au fond, le tour de force réside aussi sur la non présence de feat (mis à part Eminem sur l’énorme "Renegade"), ce qui contraste de fait avec les précédents opus de Hova et donnant l'illusion d'un album introspectif. Et dans un certain sens c'est sûrement pour cette raison que The Blueprint est si important aujourd'hui; il était annonciateur d'une tendance à venir à savoir une esbroufe sonore faussement novatrice au dépend de lyrics de fond. Pour moi, le phénomène qui explique le surévaluation de The Blueprint s'explique par l'absence de leadership sur New-york et surtout d'un besoin d'un renouveau sonore marquant à l'heure où la Southside montait en puissance. Mais qu'à cela ne tienne, The Blueprint n'en reste pas moins un classique qui se bonifie avec le temps. Fait assez cocasse, The Blueprint sort un 11 septembre. Ça tombe bien, ça colle avec mon analyse à venir en fin d'article. (écouter un extrait)



2
Masta Ace - Disposable Arts


Second album de Masta Ace, Disposable Arts est à mon sens l'anti Blueprint. Ici le fond est mis en avant par rapport à la forme. Plume intelligente, flow impeccable, beats urbains. Disposable Arts c'est avant tout un album concept narrant l'histoire d'un jeune homme noir fraîchement sorti de prison se retrouvant confrontés aux divers changements de son quartier et de sa famille. L'album nous propose de partager le temps de 24 pistes un quotidien où se mêlent mélancolie et espoir vers des jours meilleurs. Tout simplement magique. (écouter un extrait)



And the winners is



1

Nas - Stillmatic

En 1994 Nas invente le Rap moderne avec Illmatic. En 2001, force est de constater que Nas enchaîne échec sur échec avec les infâmes Iam ou Nastradamus, si loin du talent auquel il nous avait habitué à ses débuts. Pour nous replacer dans le contexte de l'époque, il faut savoir que suite à la mort de Notorious BIG en 1997, la scène Rap de New York a redoublé d'inventivité pour prendre la place du roi déchu. Au final, ce sont Jay-Z et Nas qui se disputeront le trône avec une férocité rare. Jay-Z d'un coté peine à être crédible tant il enchaîne les étrons depuis son premier LP Reasonable Doubt, le tout pendant que Nas semble totalement démotivé. Pourtant c'est l'attaque à l'endroit de Nas avec The Takeover que Jay-Z tenta le tout pour le tout pour asseoir sa suprématie. Malheureusement pour le futur monsieur Beyoncé il n'en fallait pas plus pour réveiller un Nas conquérant et revanchard.

La réponse "Ether" fut violente et sans sommation, et Nas sorti finalement vainqueur du beef et s'enorgueillit quelques temps du titre officieux de "King of NY". Mais résumé Stillmatic à Ether serait pure folie. Ainsi, la suite d'Illmatic se veut beaucoup plus intimiste et plus en phase avec les préoccupations de la jeunesse. A ce jour, personne na encore écrit un morceau plus profond que One Mic. Personne (pas même Nas himself) (écouter un extrait)


Conclusion :  Les tours s’effondrent et emportent une part du Hip-Hop avec elles

Le 11 septembre c'est l’événement majeur qui a encore de lourdes conséquences de nos jours, l'impact fut tout autant géopolitique, économique et culturel. L’Amérique si ouverte en apparence s'est renfermer sur elle même tandis que Rudolph Giuliani termine son mandat de maire de New York et que  George W Bush succède à Bill Clinton. Si le choix du 11 septembre me parait pertinent c'est qu'il s'agit du moment clé ou le Rap contestataire disparait . Le rap revendicatif disparaît au profit d'une musique plus aseptisé et/ou faisant front contre l'ennemi de l’extérieur. Ce 11 septembre l'Amérique fait bloc et l'union nationale est de rigueur. On note par conséquent une plus grande fermeté à l'égard des immigrés (frontière avec le Mexique) une plus grande répression et une augmentation de la télésurveillance, une prolifération d'armes légales chez les citoyens et surtout une volonté de revanche contre ce que Bush a nommé l'axe du mal.

Sur  le plan musical, les années 2000 et 2001 sont donc les dernières en terme de Rap dissident authentique ayant un écho  En effet, le propos n'est pas de dire que les rappeurs n'expriment plus de pensées un tant soit peu dissidente. Le propos est de signaler que les rappeurs n'ont désormais plus d’écho quand ils osent parler. à l'heure où le monde mondialisé et soumis au marché met en avant la consommation de bien, l'apparat et le superficiel au profit du concret, ce qui est en partie le monde idéal pour le rappeur de base.  Quel crédibilité donné a ses rebelles devenu nabab ? Ainsi, Le 11 septembre est le moment clé ou le Rap US fait bloc et n'ose pas ou plus aller à contre courant de l'opinion public (du marché). Par exemple, ils étaient tous pour les guerres successives en Afghanistan et en Irak, il a fallu attendre 2004 qu'un grand nom comme Eminem avec le titre "Mosh" sûrement motivé par le fiasco Irakien pour avoir un semblant de rap dissident ou plus risible cette fois, attendre l'ouragan Katrina pour voir Kanye West insulté George Bush.  Bien entendu, cela ne fait désormais plus aucune différence tant le rappeurs devient une Popstar à partir de 2001. Posez vous la question ? Comment se fait il qu'en dépit de toutes les choses gravissimes se passant aux Etats Unis ou dans le monde n'émerge pas de nouveau : Ice Cube ou Public Enemy ? Le piège serait de penser que le rappeur a cesser de rapper pour "les noirs du ghetto" au profit des "blancs de la classe moyenne", cette lecture est erroné dans la mesure où les blancs écoutent du rap depuis le début et participent à la vie du Rap Game. Ce ne sont pas Les Beastie Boy, Jimmy Lovine ou Jerry Heller qui diront le contraire. La vérité c'est que la cupidité à pousser la plupart des artistes à "popiser" leur musique pensant vendre plus et ratisser large (ex: Ja rule). L'argent étant la finalité de tout rappeur, ce que certain pourraient nommer "trahison" n'est finalement qu'une suite logique vers ce qu'est une partie du Rap d'aujourd'hui, le 11 septembre n'ayant fait qu’accélérer le processus propre à toute musique au bout du compte. Les rappeurs rugissant autrefois comme des lions, miaulent dorénavant comme des chatons.

Bien entendu, si 2001 est un tournant et l'aboutissement du Rap en terme d'industrie, il peut être intéressant de voir comment évolueront les choses. Notamment, qui tirera son épingle du jeu dans ce nouveau Rap Game et comment différent courants parviendront à coexister. Pour cela je vous donne rendez vous pour un classement 2002 un peu plus joyeux. (espérons).

1 commentaire:

  1. "Le problème de Blueprint à mon sens, c'est qu'il ne représente finalement qu'une révolution sonore avant d’être une caution en terme de lyrics ce qui l’empêche d’être un tout" Complètement d'accord.

    Sinon c'est Jimmy Iovine, avec un "i" majuscule :)

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